Jean Poperen (né le 9 janvier 1925 à Angers (Maine-et-Loire), mort le 23 août 1997 à Paris) grandit dans une famille de sensibilité de gauche. Son père, Maurice Poperen, instituteur, est militant du Syndicat national des instituteurs (SNI) au sein de la tendance École émancipée et membre du Secours rouge, historien des luttes ouvrières en Anjou. Sa mère, Marie Graffeuil, ouvrière dentellière, meurt quand il n’avait que douze ans.
Secrétaire de l'UECExclu en 1956 |
Élève au lycée d’Angers, puis en classe préparatoire à Rennes (hypokhâgne) et Louis-le-Grand à Paris (khâgne), Jean Poperen s’inscrit ensuite à la Sorbonne. À dix-huit ans, il entre au Parti communiste, dans la clandestinité, en 1942-1943.
Responsable des Jeunesses communistes de la Seine sous l’occupation, il devient secrétaire national des Etudiants communistes à la Libération. Reçu major à l’agrégation d’histoire en 1947, Jean Poperen débute sa carrière professionnelle au lycée d’Amiens où il est secrétaire de la cellule communiste de l’établissement.
À la même époque, il entreprend une thèse sur la situation économique et sociale de la paysannerie d’Indre-et-Loire à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, sous la direction d’Ernest Labrousse.
Il est membre du comité de la section d’Amiens et en 1950, il est élu au bureau fédéral.
En 1952, il est envoyé à l’école des cadres du Kominform, à Bucarest. Il y est chargé de l'adaptation en français de textes soviétiques. Il renonce rapidement à cette activité.
À son retour en France, en 1953, Jean Poperen reprend son métier d’enseignant, au lycée Janson-de-Sailly (Paris), puis à l’université de Paris I, comme maître-assistant (puis maître de conférences, 1986), spécialiste de la Révolution française et le robespierrisme.
En 1956, la révélation des crimes de Staline et l’insurrection de Budapest, l’intervention des chars soviétiques, le poussent à prendre ses distances vis-à-vis du Parti communiste. De plus en plus critique, il était soupçonné de « fractionnisme » par la direction du PCF, qui charge Philippe Robrieux, alors étoile montante de l’UEC, de le surveiller. En avril 1958, deux mois après le retour au pouvoir du général de Gaulle, qu’il concevait comme une « défaite » du mouvement ouvrier dans laquelle le PCF avait une lourde responsabilité, Jean Poperen publie, avec quarante-huit intellectuels communistes, dont François Furet, le premier numéro du journal Tribune du communisme, autour duquel se forme un groupe du même nom. Il quitte le PCF et manifeste dès lors un anti-soviétisme résolu et constant.
En 1960, avec Édouard Depreux et Gilles Martinet, Jean Poperen fonde le Parti socialiste unifié (PSU), né de la fusion entre Tribune du communisme, l’Union de la gauche socialiste et le Parti socialiste autonome, nouveau parti dont il est l’un des dirigeants nationaux jusqu’en 1963. Au PSU, il occupe l’espace entre les « gauchistes » et les « modernistes » de Michel Rocard, qu’il accuse alors de « social-technocratie ».
Aux élections législatives de novembre 1962, Jean Poperen, est le candidat du PSU dans la 11e circonscription de la Seine. Il y affronte un baron du gaullisme, le Ministre de l’Intérieur Roger Frey. Jean Poperen recueille 2 445 voix (6,9%) au premier tour. Il est à nouveau candidat dans la même circonscription à l’occasion de élection partielle, le 19 septembre 1965, et réalise 8,5 %.
En désaccord avec l’orientation autonomiste adoptée au congrès national du PSU de 1967, qui voit l’accession de Michel Rocard à la tête du parti, Jean Poperen met en place au sein du PSU, l’Union des groupes et des clubs socialistes (UGCS) dont il est président. Il plaide en faveur de l’union de la gauche dans le journal Combat. Exclu du PSU en décembre 1967, il rallie la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS), qui regroupe, depuis l’élection présidentielle de 1965, la SFIO, le Parti radical et les clubs (notamment la Convention des Institutions Républicaines (CIR) de François Mitterrand). En 1968, Jean Poperen, entre au bureau politique de la FGDS. Après la dissolution de l’UGCS, Jean Poperen et ses amis créent l’ERIS (Études, recherches et informations socialistes), qui se consacre au travail théorique. En 1971, il prend part à la constitution du Parti socialiste au congrès d’Épinay, où il présente sa motion « Pour un Parti socialiste orienté à gauche » et obtient 12% des suffrages. Il se prononce lors du vote final pour la motion Savary-Mollet et contre la motion de synthèse Mitterrand-Defferre-Mauroy-Chevènement, qui constitue la majorité du parti. Cette « faute originelle » l’empêche sans doute d’entrer dans le premier cercle mitterrandien. Les relations entre les deux hommes sont souvent résumées par ce fameux dialogue : « Poperen, vous êtes vraiment loyal, mais vous n’êtes vraiment pas facile. - Vous non plus. »
Jean Poperen intègre le Comité directeur du PS dès 1971 et constitue un courant prônant la lutte des classes, la rupture avec le capitalisme et une laïcité intransigeante.
Aux élections législatives de mars 1973, Jean Poperen est parachuté dans une nouvelle circonscription de l’est du Rhône (Meyzieu, Bron, Vaux-en-Velin). Il est élu au second tour avec 57,6 % des suffrages exprimés. Au congrès socialiste de Grenoble, qui se tint trois mois après le scrutin législatif, Jean Poperen rallie le courant majoritaire et devient délégué responsable de la politique industrielle et de l’aménagement du territoire.
Il bataille pour l’ancrage à gauche de son parti et contre l’entrée au PS des minoritaires du PSU, qu’il qualifie de « Rocard d’Estaing » et de « sirènes néo-MRP ». En 1975, il entre au secrétariat national du parti, chargé de l’organisation et de la propagande. La même année, il est élu au comité central de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA).
En 1977, Jean Poperen est élu maire de Meyzieu, une commune ouvrière de la banlieue lyonnaise. L’année suivante, il est réélu député de la 13e circonscription du Rhône, avec un score de 60,1 %. A l’issue du congrès socialiste de Metz (1979), Jean Poperen devient responsabilité des élections et de la coordination au secrétariat national.
En 1981, après l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, Jean Poperen est réélu député, avec 66,2 % des suffrages exprimés. Candidat à la présidence du groupe parlementaire socialiste, Jean Poperen doit s’incliner devant Pierre Joxe. Au congrès socialiste de Valence d’octobre 1981, il devient secrétaire national à la coordination chargé des élections, soit le numéro 2 du PS aux côtes de Lionel Jospin. En 1982, à l’Assemb1ée nationale, il joue un rôle très actif dans l’élaboration de la « loi PLM » (Paris-Lyon-Marseille) qui entérine le statut particulier des trois communes.
Intransigeant sur la laïcité, il défend avec énergie le projet de loi relatif aux rapports entre l’enseignement public et l’enseignement privé, loi pour un grand service public unifié de l’Éducation nationale, promis par François Mitterrand durant la campagne présidentielle. Il vit comme une trahison le recul du gouvernement et du Président de la République en juillet 1984.
En 1986, il soutint Lionel Jospin contre Laurent Fabius. Au congrès de Lille d’avril 1987, il perd son poste de numéro 2 du PS et entre au conseil politique du parti avec les anciens ministres du PS. Avec d’autres responsables socialistes, dont Jean-Marc Ayrault, Jean Poperen reconstitue alors son courant et défend le nouveau contrat social, afin de trouver le meilleur compromis possible pour les intérêts du salariat.
En mai 1988, après la réélection de François Mitterrand, Jean Poperen est appelé au gouvernement par Michel Rocard comme ministre chargé des relations avec le Parlement.
Il est réélu à l’issue d’une triangulaire, aux élections législatives de juin 1988. Il conserve son mandat de maire suite aux élections municipales de 1989.
Jean Poperen combat la politique d’ouverture de François Mitterrand dans laquelle il ne voyait que des débauchages individuels. « On a tellement ouvert que nos électeurs sont sortis» avoue le ministre, qui reçoit, pour cette phrase, le premier prix de l’humour politique 1989.
En 1990, il convoite le poste de premier secrétaire du PS au congrès de Rennes mais sa motion ne recueillit que 7 %. Il conserve son portefeuille dans le gouvernement d’Édith Cresson jusqu’en avril 1992.
Au Congrès du Bourget en 1993, sa motion obtient 11 % des voix. Critique à l’égard des années de pouvoir, il estime que les socialistes ont rompu avec le socialisme : « la politique menée depuis 1983 n’était pas une politique socialiste mais une gestion à vernis social de l’économie libérale. » Aussi, Jean Poperen explique l’échec du PS aux législatives par la déception qu’il a créée dans le monde du travail.
S’il ne se représente pas aux élections législatives de 1993, Jean Poperen est candidat à sa propre succession à la mairie de Meyzieu en 1995 et est réélu pour un quatrième mandat consécutif. Il soutient la candidature de Lionel Jospin à la présidentielle de mai 1995 et à la tête du PS en octobre 1995.
Jean Poperen reste maire de Meyzieux jusqu’à sa mort, survenue en 1997, suite à un accident cérébral.
Jean Poperen est l’auteur de nombreux livres historiques et politiques, notamment une Anthologie de textes choisis de Robespierre, dont il était un fin connaisseur.
En 1999, les archives de Jean Poperen ont été confiées par sa veuve, Nathalie Poperen, au Centre d’histoire du travail de Nantes, qui conserve aussi les archives de son père, Maurice Poperen.
Il était membre du Grand Orient de France (GODF).
Son frère Claude Poperen, secrétaire général du syndicat de Renault-Billancourt de 1958 à 1967, fut membre du bureau politique du PCF puis « reconstructeur ».
Sources
Jean Poperen – Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - Julien Cahon
Jean Poperen – Wikipédia
Jean Poperen – Assemblée Nationale
Mandats électifs
Député PS : 1973 - 1988
Maire PS de Meyzieu : 1977 - 1997)
Conseiller régional de Rhône-Alpes : 1973 - 1992
Responsabilités au PCF
Secrétaire des Etudiants communistes : 1947
Responsabilités gouvernementales
Ministre chargé des relations avec le Parlement : 1988 - 1992
Publications
Anthologie de textes choisis de Robespierre, Éditions sociales, 3 volumes, 1957.
Une stratégie pour la Gauche, Fayard, 1969.
Des trois glorieuses au printemps des peuples 1830-1848, Burin-Martinsart, 1972.
La Gauche française, tome 1 : Le nouvel âge (1958-1965), Fayard, 1972.
La gauche française, tome 2 : L’Unité de la gauche, Fayard, 1975. —
Nous sommes tous archaïques, Robmot, 1978.
Le nouveau contrat socialiste : Socialistes et liberté, Ramsay, 1985.
Socialistes. La chute finale ? avec Emmanuel Maurel, Plon, 1993.